Mise à jour : 05 août 2025
Dans le Darfour du Nord, plus de 40.000 enfants ont été admis pour traitement contre la malnutrition aiguë sévère au cours des cinq premiers mois de l’année, soit le double du nombre enregistré à la même période l’année dernière.
Les dernières études, menées dans les cinq régions du Darfour (entre avril et mai 2025), révèlent une augmentation très alarmante de la malnutrition infantile. Dans 9 des 13 localités, le taux de malnutrition aiguë a dépassé les niveaux d’urgence fixés par l’OMS.
La localité de Yasin, dans le Darfour-Oriental, révèle un taux de malnutrition aiguë globale (qui comprend la malnutrition aiguë sévère et modérée) atteignant 28%. Si ce chiffre atteint 30%, il dépassera l’un des trois seuils critiques fixés pour déclarer une famine. Ces données annoncent une catastrophe sans précédent pour les enfants si des mesures urgentes ne sont pas prises, dans un pays où la famine sévit déjà dans plusieurs régions.
L’urgence nutritionnelle s’aggrave
« Les enfants du Darfour sont affamés en raison du conflit et privés de l’aide qui pourrait leur sauver la vie », déclare Sheldon Yett, représentant d’UNICEF Soudan. « Même avant que la saison de soudure ne s’installe, les chiffres étaient déjà alarmants. Ils risquent de s’aggraver sans une intervention humanitaire rapide. Nous sommes à un moment critique : la vie des enfants dépend de la décision du monde d’agir ou de détourner le regard. »
La situation est également alarmante dans d’autres régions du pays. Les admissions pour malnutrition aiguë sévère ont augmenté de plus de 70% dans le nord du Kordofan, de 174% dans l’État de Khartoum et de 683% dans l’État d’Al Jazirah. À noter qu'à Al Jazirah et à Khartoum, l’augmentation des taux d’admission s’explique en partie par l’amélioration de la sécurité et de l’accès humanitaire, qui permet aux mères de se rendre plus facilement dans les centres de santé pour obtenir de l’aide.
Alors que le Soudan est actuellement dans la période la plus critique de la saison de soudure, le risque de mortalité infantile massive augmente rapidement dans les régions déjà proches du seuil de famine. Les épidémies de choléra, les cas de rougeole et l’effondrement des services de santé aggravent la crise et exposent les enfants à un risque encore plus grand.
Propagation du choléra
Depuis la détection du premier cas de choléra (le 21 juin 2025), plus de 1.180 cas (dont environ 300 chez des enfants) et au moins 20 décès ont été signalés à Tawila, dans l'État du Darfour-Nord. Une augmentation rapide dans cette ville qui a accueilli plus de 500.000 personnes déplacées à l'intérieur du pays, fuyant les violents conflits depuis avril dernier. Outre le choléra, plus de 640.000 enfants de moins de cinq ans sont exposés à un risque accru de violence, de maladie et de famine.
Dans le Darfour-Nord, des hôpitaux ont été bombardés et les établissements de santé situés dans et autour des zones proches des combats ont été contraints de fermer. L'accès très limité aux soins de santé, combiné à la pénurie d'eau potable et au manque d'installations sanitaires, augmente le risque de propagation du choléra et d'autres maladies mortelles, en particulier dans les sites de déplacement surpeuplés.
Un accès humanitaire paralysé
La malnutrition aiguë sévère est la forme la plus mortelle de malnutrition. Les enfants qui en sont atteints sont extrêmement exposés aux complications potentiellement mortelles et présentent un taux de mortalité élevé s’ils ne reçoivent pas des soins adéquats ou appropriés.
Depuis avril, le conflit dans le Darfour du Nord s'est intensifié, en particulier autour d’Al Fasher et du camp de Zamzam. Des quartiers entiers ont été assiégés, des hôpitaux bombardés et des routes bloquées. Les convois humanitaires sont victimes de pillages et d’attaques et l’accès humanitaire est désormais presque totalement coupé.
L’UNICEF a cependant pu acheminer un lot de fournitures à Al Fasher en début d’année, mais les tentatives d’en acheminer davantage ont été compromises par l’insécurité. Les stocks d’aliments thérapeutiques prêts à l’emploi sont désormais épuisés à Al Fasher. Les établissements de santé à Zamzam et dans ses environs ont fermé leurs portes, tandis que les pénuries d’eau et le manque d’hygiène font planer la menace d’une propagation du choléra et d’autres maladies mortelles.
Déplacements massifs et besoins croissants
En raison de la crise, des centaines de milliers de personnes ont été déplacées. Rien qu’en avril, près de 400.000 personnes ont dû fuir Zamzam, marchant jusqu’à 70 km pour atteindre Tawila. À Tawila, plus de 500.000 personnes déplacées s’entassent désormais dans des bâtiments publics ou dorment dehors, avec peu de vivres.
L’UNICEF et ses partenaires font tout leur possible pour venir en aide aux victimes de ce conflit, qu’il s’agisse de soigner les blessé·es et les enfants souffrant de malnutrition, de forer des puits ou de distribuer des vivres. Cependant, la violence génère des besoins urgents qui ne peuvent pas être comblés assez rapidement.
Le nombre d’enfants souffrant de malnutrition sévère double dans le Darfour du Nord alors que la crise alimentaire s’aggrave dans tout le Soudan.
L’UNICEF lance un appel urgent :
- Toutes les parties doivent faciliter l’accès rapide, sûr et sans entrave de l’aide humanitaire aux populations touchées ;
- La communauté internationale doit intégralement financer l’intervention humanitaire et garantir la continuité des chaînes d’approvisionnement en aliments thérapeutiques et en fournitures médicales ;
- Il est essentiel de renouveler les pressions diplomatiques sur toutes les parties afin que celles-ci cessent les hostilités et permettent à l’aide humanitaire vitale de parvenir aux enfants.